Une maison mal isolée, autrement appelée « passoire énergétique », engendre de larges émissions de gaz à effet de serre et a fortiori des factures d’énergie conséquentes. Or, les gaz à effet de serre relâchés dans l’atmosphère jouent un rôle considérable dans le réchauffement climatique. C’est pourquoi les gouvernements régionaux poussent à la rénovation énergétique de ces bâtiments sur leur territoire.
La notion de « passoire énergétique » est une expression utilisée pour désigner les logements qui ont une performance énergétique (ci-après « P.E.B. ») faible. Le classement P.E.B. se fait à l’aide d’une échelle allant de A à G : A représentant les bâtiments les plus performants et G le moins. Cette échelle de classement relève de la matière régionale, ce qui explique qu’un niveau A, par exemple, ne vise pas les mêmes exigences, selon que l’on soit en Flandre, en Wallonie ou à Bruxelles. Il n’existe pas de définition juridique d’un concept de « passoire énergétique ». Toutefois, il peut être considéré qu’en Wallonie elle se rapporte à un P.E.B. compris entre E et G, soit une consommation théorique de 340 kWh/m2 minimum.
Il est utile de préciser que cette consommation est estimée sur base d’estimations fixes et standardisées mais que, la consommation dépend en réalité de ses occupants et de leur mode de vie.[5] Ainsi, une maison correctement isolée, mais chauffée à une température supérieure à 19 degrés, peut consommer plus qu’une maison mal isolée très peu chauffée.
Afin d’encourager la rénovation des passoires énergétiques, la Région Wallonne propose un incitant économique, soit une prime à la rénovation assortie ou non de prêts à taux variables. Celle-ci se base sur les revenus du ménage et impose au propriétaire du bien de l’occuper, à titre principal, pendant au moins 5 ans après la fin des travaux. Elle vise donc à favoriser les propriétaires vis-à-vis des investisseurs qui deviennent inéligibles à la prime en revendant immédiatement le bien rénové.
Néanmoins, partant du postulat de l’octroi de la prime au propriétaire, la réduction des coûts (qui est en moyenne de 43%) ne suffit généralement pas à amortir les travaux. Seul un tiers des devis relatifs à la rénovation d’une passoire énergétique proposent une solution lucrative. Autrement, la rénovation garde une rentabilité négative pour tout saut d’étiquette énergétique.
Il est donc fortement conseillé aux propriétaires de multiplier les devis avant de commencer des travaux. En outre, la rénovation énergétique engendrant des coûts fixes, le total des dépenses pour chaque étape individuelle est supérieur à celui engagé lorsque toutes les étapes sont réalisées en un seul chantier. Cela signifie qu’il est plus avantageux de sauter plusieurs étiquettes énergétiques en une fois plutôt que de procéder étape par étape.
Cette rentabilité difficile de la rénovation doit également être combinée avec un marché wallon qui, pour l’heure, est globalement favorable aux passoires énergétiques. Ce dernier est composé d’environ un tiers de maisons mal isolées dont la différence de prix avec les maisons écologiques n’est pas suffisamment significative pour réaliser une plus-value. Pour que les travaux deviennent rentables pour le ménage moyen wallon, il faudrait que la décote en termes de prix des passoires énergétiques double. Or, en l’état actuel du marché, cette décote semble impossible.
Toutefois, le plan provisoire visant la neutralité carbone des habitations wallonnes d’ici 2050 devraient creuser un peu plus cet écart entre le prix des maisons écologiques et des passoires énergétiques. En effet, la Région a mis en place un calendrier progressif d’exigences en matière de performance énergétique. Nommément, l’interdiction de location qui frappera tous les biens classés G. sur l’échelle P.E.B., introduits nouvellement sur le marché à partir du 1er janvier 2025. Aussi, les nouveaux propriétaires de logements classés P.E.B. E, F ou G devront atteindre un P.E.B. D minimum, dans les 5 ans suivant le changement de propriété. Il a effectivement été observé, de par l’introduction de mesures similaires en Flandre, que de telles mesures avaient une influence sur le prix des passoires énergétiques.
Cependant, dans l’hypothèse de mesures wallonnes réussies, incitant les propriétaires à rénover leur passoire énergétique, il restera encore à se poser la question de la satisfaction de telles demandes. Les sollicitations risquant d’arriver en nombre, conjointement, sur un marché qui connaît déjà, particulièrement en Wallonie, une pénurie de main d’œuvre dans le secteur des projets de rénovation énergétique.